Le Comité National Français de Géographie et l'Institut de Géographie de l'université de PARIS1 Panthéon-Sorbonne, ont organisé les 13 et 14 juin 2013 un colloque : « courants et théories en géographie économique ». Ce colloque avait réuni un ensemble international de géographes sur la question du renouveau de la géographie économique française. Il s'agit de poursuivre la réflexion en montrant que la « question territoriale » est au cœur du renouvellement proposé.
L’un des constats au départ de notre réflexion est celui de l’oubli de l’espace dans la théorie économique standard (hors, trivialement, des coûts de distance) et de la nécessaire réintégration de « l’homo situs » dans le contexte et l’historicité de l’« homo oeconomicus ». Il s’agit également de revenir à la question fondamentale de la coordination des agents (ou acteurs, la nuance est importante) qui sont vecteurs de l’activité économique : produire, répartir, dépenser. Dans ce débat, il s’agit, pour que le géographe puisse parler à l’économiste et inversement, de dépasser l’opposition holisme/individualisme méthodologique, pour penser une « méso-analyse » faite de coordinations incomplètes, de gouvernances territoriales partielles et de fragments de régulations.
Une littérature convergente existe pour mettre en évidence l’absolue nécessité de la confrontation/combinaison entre économie et géographie.
Au début, tout paraît simple dans la confrontation de l'économie et de la géographie. Dans le processus de production, l'économie explique le "pourquoi" et la géographie précise le "où". Cependant, la théorie de la localisation vient figer pour l'éternité le rapport entre économie et géographie en soumettant la question du lieu de la production à la simple exigence de minimisation de la distance entre le lieu où l'on produit et le lieu où l'on consomme (le marché).
Aujourd’hui, l'accélération des tendances à la globalisation entraîne la mise en réseau à l'échelle mondiale non seulement des processus de production mais aussi des sentiers de l'innovation. La géographie ne peut plus se contenter d'enregistrer les mouvements des entreprises "nomades" qui glissent d'un pays à l'autre à la recherche de coûts de production plus faibles et d'une productivité toujours plus grande. De son côté, l'analyse économique ne peut ignorer les effets spatiaux de la globalisation.
Ce colloque vise à pousser un peu plus loin ces réflexions, pour voir comment la question territoriale et urbaine vient subvertir la théorie économique standard et ainsi faire émerger une nouvelle géographie économique.
Pour se faire, ces deux journées sont organisées autour de dix thématiques qui nous sont apparues structurantes pour réinterroger le rapport entre économie et territoires et ainsi tenter de mieux identifier les mutations en cours. Ces nouvelles perspectives (écologie, consommation, finance, mobilité, crise des politiques publiques, scènes culturelles, foncier, économie cognitive, économie collaborative) nous obligent à repenser une nouvelle géographie économique dans ses concepts et ses méthodes.
Nos dix intervenants (économiste, géographe, urbaniste, architecte), chacun spécialiste de l’une de ces thématiques, viendront débattre de ces questions (Philippe Moati, Patrick Cohendet, Olivier Crevoisier, Sonia Guelton, Christophe Demazière, Caroline Gallez, Francis Aubert, Nicolas Buclet, Dominique Sagot-Duvauroux, Alain Renk), sous le regard attentif de Jacques Levy qui sera le Grand Témoin de ce colloque.
Repères bibliographiques
Bagnasco A., Courlet C., Novarina G., 2010, Sociétés Urbaines et nouvelle économie, L’Harmattan, 121 pages.
Benko G., Strohmayer U., 1997, Space and Social Theory (interpreting Modernity and Postmodernity), Blackwell Publishers, 400 pages.
Buclet N., 2011, Le territoire entre liberté et durabilité, Presses Universitaires de France.
Dosse F., 1995, L’empire du sens, La Découverte, 432 pages.
Houée P., 2001, Le développement local au défi de la mondialisation, L’Harmattan, 250 pages.
Pecqueur B., 2004, Vers une géographie économique et culturelle autour de la notion de territoire, Géographie et Cultures, n° spécial, pp. 22-37.
Scott A., 2001, Les régions et l’économie mondiale, L’Harmattan, 187 pages.
Sen A., 1999, Un nouveau modèle économique : développement, justice, liberté, Odile Jacob.
Talandier M., Davezies L., 2009, Repenser le développement territorial ? (confrontation des modèles d’analyse et des tendances observées dans les pays développés), PUCA, collection « recherche » n° 198, 144 pages.
Zaoual H., 1998, Territoires et dynamiques économiques, L’Harmattan.